L’histoire du halo en Formule 1

Le halo est un dispositif de sécurité qui protège la tête des pilotes de monoplaces dont le cockpit est ouvert, comme en Formule 1. Il s’agit d’une barre incurvée en titane, fixée au châssis du véhicule en trois points et placée dans la ligne de mire du pilote. Le halo a pour but de dévier les objets qui pourraient heurter le casque du pilote, comme les roues, les débris ou les rails de sécurité.

Le halo sur la F1 de Carlos Sainz, pilote Ferrari, en janvier 2021 (Source : FORMULA 1)
Le halo sur la F1 de Carlos Sainz, pilote Ferrari, en janvier 2021 (Source : FORMULA 1)

Le halo est devenu obligatoire en Formule 1 à partir de la saison 2018, suite à une décision de la Fédération internationale de l’automobile (FIA). Mais comment en est-on arrivé à adopter ce système controversé ? Quelles ont été les alternatives étudiées ? Quels sont les avantages et les inconvénients du halo ? Voici un récapitulatif de l’histoire du halo en Formule 1.

Les accidents qui ont déclenché la réflexion

La sécurité des pilotes de Formule 1 a toujours été une préoccupation majeure pour la FIA, qui a mis en place de nombreuses mesures pour réduire les risques d’accidents mortels. Depuis les années 1950, les progrès ont été considérables : les voitures sont équipées de cellules de survie, de harnais, de combinaisons ignifugées et de casques renforcés.

Mais malgré ces avancées, la tête des pilotes reste exposée aux chocs et aux projections. Plusieurs accidents graves ont ainsi mis en évidence la vulnérabilité du cockpit ouvert.

  • Le 20 juillet 2009, Henry Surtees, le fils du champion du monde John Surtees, meurt à l’âge de 18 ans lors d’une course de Formule 2 à Brands Hatch (Angleterre). Il est percuté à la tête par une roue qui s’est détachée d’une autre voiture.
  • Le 25 juillet 2009, Felipe Massa est gravement blessé lors des qualifications du Grand Prix de Hongrie. Il reçoit un ressort métallique provenant de la voiture de Rubens Barrichello. Le ressort lui fracture le crâne et lui cause une commotion cérébrale.
  • Le 5 octobre 2014, Jules Bianchi perd le contrôle de sa voiture sous la pluie lors du Grand Prix du Japon. Il glisse hors de la piste et s’encastre sous un engin de levage qui évacuait une autre voiture accidentée. Il subit des lésions cérébrales irréversibles et décède le 17 juillet 2015.
  • Le 24 août 2015, Justin Wilson meurt à l’âge de 37 ans lors d’une course d’IndyCar à Pocono (États-Unis). Il est frappé à la tête par un morceau de carrosserie qui s’est envolé après une collision entre deux autres voitures.

Ces accidents tragiques ont poussé la FIA à réfléchir à des solutions pour mieux protéger le cockpit des monoplaces. Plusieurs concepts ont été testés avant que le halo ne soit retenu.

Les alternatives au halo

La FIA a lancé en 2011 un programme de recherche sur les systèmes de protection du cockpit. Trois projets ont été étudiés par l’Institut global pour la sécurité en sport automobile, partenaire de la FIA.

  • L’AFP (Additional Frontal Protection) : il s’agit d’un double aileron placé à l’avant de la voiture, qui vise à dévier les objets qui arrivent de face. Ce système est léger et n’entrave pas la visibilité, mais il est jugé insuffisant pour arrêter les gros objets ou les chocs latéraux.
Le dispositif AFP sur une voiture de course. Il est notamment présent en IndyCar (Source : Racer.com)
Le dispositif AFP sur une voiture de course. Il est notamment présent en IndyCar (Source : Racer.com)
  • Le pare-brise : il s’agit d’une vitre transparente qui recouvre le cockpit, comme sur les voitures de tourisme. Ce système offre une bonne protection contre les petits objets, mais il pose des problèmes de visibilité, de reflets, de buée, de nettoyage et de résistance aux chocs.
Le pare-brise, testé sur la F1 de Daniel Ricciardo, alors pilote chez Red Bull, aux essais libres du GP de Russie en 2016 (Source : © Getty Images)
Le pare-brise, testé sur la F1 de Daniel Ricciardo, alors pilote chez Red Bull, aux essais libres du GP de Russie en 2016 (Source : © Getty Images)
  • Le halo : il s’agit d’un arceau en titane qui entoure le cockpit, avec un pilier central qui passe devant le casque du pilote. Ce système est le plus efficace pour dévier les objets, même les plus lourds et les plus rapides. Il résiste à une force équivalente à 12 tonnes.
Raikkonen Ferrari SF71H Testing Barcelona cropped L'histoire du halo en Formule 1
Kimi Räikkönen teste la Ferrari SF71H lors des essais de pré-saison à Barcelone en 2018 avec le nouveau Halo (Source : Artes Max)

La FIA a testé ces trois systèmes en soumettant des prototypes à des impacts réels ou simulés. Le halo s’est révélé le plus performant, avec une efficacité estimée à 17 % contre 10 % pour le pare-brise et 3 % pour l’AFP.

Images des tests de résistance du halo. Source : FIA

La fronde contre le halo

Les opposants au halo étaient principalement des équipes, des pilotes et des fans qui trouvaient que ce dispositif nuisait à l’esthétique et à l’esprit des monoplaces. Voici quelques-uns de leurs arguments :

  • Le halo dénature le design des voitures, qui perdent leur élégance et leur pureté. Certains le comparent à une « tong » ou à un « flip-flop ».
  • Le halo gêne la visibilité du pilote, qui doit regarder à travers un pilier central qui passe devant son casque. Il peut aussi masquer les feux de signalisation ou les drapeaux.
  • Le halo complique l’extraction du pilote en cas d’urgence, car il faut le détacher du châssis ou le découper. Il peut aussi empêcher les commissaires de piste d’intervenir rapidement.
  • Le halo alourdit les voitures, qui doivent augmenter leur poids minimum de 6 kg pour compenser celui du dispositif. Il modifie aussi l’aérodynamique et le centre de gravité des voitures.
  • Le halo va à l’encontre de la tradition et de la philosophie de la Formule 1, qui est un sport à risque où les pilotes doivent accepter de mettre leur vie en jeu. Il réduit le spectacle et l’émotion pour les spectateurs.

Parmi les opposants au halo, on peut citer :

  • Niki Lauda, triple champion du monde de F1, qui disait que le halo « détruisait l’ADN d’une voiture de F1« 
  • Max Verstappen, pilote de Red Bull, qui détestait le halo et qui affirmait qu’il ne voulait pas « ressembler à un robot »
  • Nico Hülkenberg, pilote de Renault, qui trouvait le halo « horrible » et qui pensait qu’il n’était pas nécessaire
  • Lewis Hamilton, septuple champion du monde de F1, qui disait ne pas aimer l’apparence du halo mais qu’il s’y habituerait
  • Toto Wolff, directeur de Mercedes, qui disait qu’il « couperait le halo à la scie » s’il le pouvait même si la sécurité passe avant les contraintes aérodynamiques et visuelles
  • Romain Grojean, en 2017, avant l’introduction du halo, il a déclaré : « Je ne suis pas fan du halo et je ne le serai jamais. Je pense que c’est un dispositif qui n’a pas sa place en Formule 1. ». En 2018, après avoir testé le halo lors des essais hivernaux, il a dit : « Je n’ai pas changé d’avis sur le halo. Je pense toujours que c’est une mauvaise idée pour la Formule 1. Mais c’est la règle et on doit faire avec. ». En 2020, après son accident au Grand Prix de Bahreïn, il a reconnu : « Je n’étais pas pour le halo il y a quelques années mais je pense que c’est la meilleure chose qu’on ait faite pour la Formule 1 et sans lui je ne pourrais pas vous parler aujourd’hui. »

L’adoption du halo

En février 2016, la Commission F1 se prononce en faveur du halo, qui est alors développé par Mercedes. Ferrari teste son prototype de pare-brise transparent lors des essais hivernaux de Barcelone, mais le pilote Kimi Räikkönen se plaint de distorsions visuelles. La FIA espère introduire le halo dès 2017.

Mais en juillet 2016, la F1 repousse l’introduction du halo à 2018, afin de poursuivre les tests et de répondre aux critiques des équipes et des pilotes. Certains estiment que le halo dénature l’esthétique et l’esprit des monoplaces, qu’il gêne la visibilité et qu’il peut compliquer l’extraction du pilote en cas d’urgence.

En février 2017, Red Bull présente un nouveau concept de pare-brise baptisé Aeroscreen, qui combine une vitre transparente et un arceau métallique. Ce système est testé lors des essais libres du Grand Prix de Russie, mais il ne convainc pas la FIA, qui lui préfère le halo.

En juillet 2017, la FIA annonce officiellement que le halo sera obligatoire en Formule 1 à partir de la saison 2018. La décision est motivée par des raisons de sécurité, malgré les réticences des équipes et des fans. La FIA affirme que le halo aurait pu sauver la vie de Jules Bianchi ou éviter les blessures de Felipe Massa.

Les conséquences du halo

Le halo a été introduit en Formule 1 en 2018, ainsi que dans d’autres catégories de monoplaces comme la Formule 2, la Formule 3 ou la Formule E. Chaque équipe a dû adapter sa voiture au nouveau dispositif, qui pèse environ 14 kg et modifie l’aérodynamique et le centre de gravité.

Le halo a également entraîné des changements dans le règlement technique et sportif. Par exemple, le poids minimum des voitures a été augmenté de 6 kg pour compenser celui du halo. Le temps maximum pour extraire un pilote du cockpit a été porté de 5 à 10 secondes. Les essais d’impact ont été renforcés pour vérifier la solidité du halo.

Le halo a aussi suscité des réactions mitigées chez les pilotes et les fans. Certains ont salué son apport en matière de sécurité, tandis que d’autres ont déploré son aspect inesthétique ou son impact sur la vision. Certains ont même surnommé le halo « la tong » ou « le flip-flop ».

Mais malgré ces critiques, le halo a prouvé son utilité à plusieurs reprises. En août 2018, Charles Leclerc échappe à un choc avec la roue arrière de Fernando Alonso lors du départ du Grand Prix de Belgique.

En septembre 2021, Lewis Hamilton évite le pire lorsque Max Verstappen atterrit sur sa tête lors du Grand Prix d’Italie. Le casque du pilote est protégé par le halo, qui résiste à la pression de la voiture adverse.

Point de vue d’Hamilton et Vertsappen lors de leur accident

En novembre 2020, Romain Grosjean survit à un terrible accident lors du Grand Prix de Bahreïn. Sa voiture s’embrase après avoir percuté un rail de sécurité à plus de 200 km/h. Le pilote parvient à s’extraire des flammes en moins de 30 secondes. Il souffre de brûlures aux mains et aux pieds, mais il reconnaît que le halo lui a sauvé la vie.

Le futur du halo

Le halo est désormais un élément incontournable de la Formule 1, qui a démontré son efficacité pour protéger les pilotes. Mais cela ne signifie pas qu’il ne peut pas être amélioré. La FIA continue de travailler sur le développement et l’optimisation du système, en tenant compte des retours des équipes et des pilotes.

Par exemple, la FIA envisage de réduire le poids du halo, qui pèse actuellement 14 kg, pour alléger les voitures et améliorer leurs performances. Elle étudie également la possibilité d’ajouter des caméras ou des capteurs sur le halo, pour améliorer la visibilité et la sécurité.

La FIA n’exclut pas non plus de tester d’autres concepts de protection du cockpit, comme le pare-brise ou l’Aeroscreen, qui pourraient offrir une meilleure esthétique ou une meilleure intégration à la voiture. Mais pour l’instant, le halo reste la solution privilégiée par la FIA, qui ne compte pas revenir en arrière sur sa décision.

En résumé

Le halo est un dispositif de sécurité qui a révolutionné la Formule 1. Il a été adopté après plusieurs accidents mortels ou graves qui ont mis en évidence la vulnérabilité du cockpit ouvert. Il a été préféré à d’autres systèmes comme le pare-brise ou l’AFP, qui présentaient des inconvénients ou des limites.

Le halo a suscité des critiques et des controverses lors de son introduction, mais il a aussi sauvé des vies et évité des blessures. Il a prouvé son utilité et sa fiabilité à plusieurs reprises, et il est désormais accepté par la majorité des acteurs de la Formule 1.

Le halo n’est pas parfait, et il peut encore être amélioré. La FIA continue de travailler sur son développement et son optimisation, en tenant compte des besoins et des attentes des équipes et des pilotes. Le halo est le symbole d’une Formule 1 qui se veut plus sûre, mais aussi plus innovante.

Lexique

  • AFP : Additional Frontal Protection, un double aileron placé à l’avant de la voiture pour dévier les objets qui arrivent de face
  • Aeroscreen : un concept de pare-brise combinant une vitre transparente et un arceau métallique
  • Cellule de survie : la partie centrale du châssis d’une monoplace, qui contient le cockpit et le réservoir de carburant
  • Cockpit : l’espace où se trouve le pilote dans une monoplace
  • Halo : une barre incurvée en titane qui entoure le cockpit et protège la tête du pilote
  • Pare-brise : une vitre transparente qui recouvre le cockpit et protège le pilote des petits objets

Sources

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